Merci à Véronique Fournier, stagiaire en droit chez Norton Rose à Québec, pour sa collaboration à la préparation du présent article.

Dans une décision récente de la Commission des lésions professionnelles (Garoy Construction inc. et Jean Leclerc Excavation, 2013 QCCLP 1920, (Me René Napert, juge administratif)), la suspension des travaux imposée sur le chantier de l’employeur est confirmée en raison du danger que représentait l’utilisation d’équipements fonctionnant à l’essence ou au diesel à l’intérieur d’un bâtiment.

Cette décision confirme et rappelle les pouvoirs larges conférés à l’inspecteur de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, dont celui de suspendre les travaux, lequel est prévu à l’article 186 de cette loi :

186. Un inspecteur peut ordonner la suspension des travaux ou la fermeture, en tout ou en partie, d’un lieu de travail et, s’il y a lieu, apposer les scellés lorsqu’il juge qu’il y a danger pour la santé, la sécurité ou l’intégrité physique des travailleurs.

Il doit alors motiver sa décision par écrit dans les plus brefs délais et indiquer les mesures à prendre pour éliminer le danger.

L’article 183 s’applique, compte tenu des adaptations nécessaires, à cet ordre de l’inspecteur.

La suspension des travaux ne devrait en rien être une mesure ultime et exceptionnelle, de l’avis du juge administratif. Que faut-il retenir de cette décision récente ?

Dans cette affaire, un inspecteur de la CSST se présente sur le chantier de construction de l’employeur, agissant aussi à titre de maître d’œuvre. Il y constate que des travailleurs utilisent des équipements fonctionnant à l’essence et au diesel,  qu’il n’y a pas de système de ventilation  et que les responsables de chantier ne possèdent pas de détecteurs de monoxyde de carbone. Il conclut que l’employeur n’est pas en mesure de contrôler le danger d’intoxication au CO2 et ordonne la suspension des travaux jusqu’à nouvel ordre. La CSST, en révision, confirme cette décision.

L’employeur dépose une requête en contestation à la Commission des lésions professionnelles.

L’employeur estime que la mesure de suspension des travaux est injustifiée puisque les équipements étaient bien entretenus et que l’enceinte dans laquelle les travaux étaient exécutés bénéficiait d’une ventilation naturelle. En outre, selon lui, la concentration de CO2 était en-deça des limites permises.

Le tribunal  confirme que le danger ne doit pas être imminent, grave et intolérable pour que l’inspecteur puisse imposer une suspension des travaux en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la loi. Il faut savoir que cette mesure vise aussi la prévention. Le fait que les travailleurs n’aient ressenti aucun symtôme n’est d’aucune pertinence.  La contestation de l’employeur est rejetée et la suspension des travaux confirmée.

Cette décision illustre les importants pouvoirs de la CSST et des inspecteurs pour assurer que l’esprit et la lettre de la législation en matière de santé et de sécurité au Québec soient pleinement mis en oeuvre.