Les salariés protégés (représentants du personnel, délégués ou représentants syndicaux, salariés mandatés, etc.) bénéficient d’un statut particulier, eu égard à leur rôle dans l’entreprise. A ce titre, toute modification, et a fortiori, rupture de leur contrat de travail doit être autorisée par l’inspection du travail.

La conclusion d’une rupture conventionnelle homologuée, quand bien même il s’agit d’un mode de rupture qui suppose l’accord du salarié, ne déroge pas à cette règle. Afin que la rupture conventionnelle soit valablement conclue, l’employeur doit par conséquent solliciter et obtenir l’autorisation de l’inspection du travail.

Cette procédure a une incidence directe sur le contentieux issu de la rupture conventionnelle des salariés protégés. En effet, la Cour de cassation a clairement posé le principe, en 2014, que la décision de l’inspection du travail, qui est une décision administrative, fait obstacle à ce que le juge judiciaire se prononce ensuite sur la validité de la convention de rupture et, notamment, l’existence d’un vice du consentement ayant entaché la procédure.

Un délégué du personnel, ayant signé en 2010 une rupture conventionnelle homologuée, a saisi un an plus tard la juridiction prud’homale en invoquant l’existence d’un harcèlement moral lorsqu’il était salarié de l’entreprise. Non seulement le salarié demandait l’octroi de dommages et intérêts afin de réparer le préjudice subi, mais en outre, il réclamait l’annulation de la convention de rupture signée en 2010, en arguant du fait que le harcèlement moral dont il avait fait l’objet avait vicié son consentement.

La Cour d’appel a fait droit aux demandes de dommages et intérêts du salarié, considérant que celui-ci apportait la preuve du harcèlement moral allégué. Notamment, le salarié s’était vu retirer certaines de ses responsabilités, ainsi que son téléphone portable professionnel et son bureau. Par ailleurs, il avait fait l’objet de propos désobligeants. Par ailleurs, la société employeur avait enfreint les règles relatives aux heures de délégation, dont le salarié bénéficiait en qualité de délégué du personnel. La Cour d’appel a ainsi attribué au salarié des dommages et intérêts à hauteur de 3.800 euros.

Cependant, en application directe de la jurisprudence de la Cour de cassation de 2014, la Cour d’appel s’est déclarée incompétente pour statuer sur la validité de la rupture conventionnelle. Elle a en effet considéré que l’inspecteur du travail était seul compétent pour autoriser la rupture conventionnelle du contrat de travail.

Il appartient en effet à l’inspecteur du travail, dans le cadre de la demande d’autorisation de la rupture conventionnelle, de s’assurer, d’une part de la liberté du consentement des parties, d’autre part de l’absence de lien entre la rupture et le mandat électif ou de représentation détenu par le salarié, et enfin, de la régularité de la procédure suivie.

Par conséquent, en en application du principe de séparation des pouvoirs administratif et judiciaire, la Cour d’appel a jugé irrecevable la demande du salarié au titre de la rupture conventionnelle.

Le salarié a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt de la Cour d’appel, espérant sans doute que la Cour de cassation revienne sur sa position.

La Cour de cassation, réunie en formation plénière, a cependant réaffirmé le principe posé en 2014, ajoutant expressément, pour lever tout doute éventuel, que ce principe s’applique également dans les situations où la contestation du salarié porte sur la validité de son consentement qui serait vicié du fait d’un harcèlement moral.

Tout recours devant le juge judiciaire étant exclu, il appartient donc au salarié qui souhaite contester la rupture conventionnelle conclue de formuler son recours à l’encontre de la décision de l’inspecteur du travail ayant autorisé la rupture conventionnelle, soit dans le cadre d’un recours hiérarchique (devant le ministre du travail), soit dans le cadre d’un recours contentieux (devant le tribunal administratif).