Dans une décision récente[1], le Tribunal administratif du travail (le « Tribunal ») conclut que le confinement obligatoire de 14 jours en vigueur pour les voyageurs durant la pandémie n’a pas pour effet de faire naître un droit d’obtenir une prolongation de la période de vacances. Cette décision confirme ainsi le droit d’un employeur d’exiger qu’un salarié planifie ses vacances en tenant compte des mesures sanitaires applicables, et ce, sans prolongation.
Le contexte
En avril 2020, la plaignante, qui travaille à titre d’assistante-gérante pour l’employeur, présente une demande de vacances d’une durée de trois (3) semaines consécutives dont elle souhaite profiter en voyageant à l’étranger. Son supérieur immédiat accepte sa demande quelques jours plus tard.
Dans les deux (2) jours précédant le voyage à l’étranger, les représentants de l’employeur contactent la plaignante et lui demandent si elle est informée du confinement obligatoire de quatorze (14) jours pour les personnes ayant voyagé à l’étranger. Compte tenu des consignes sanitaires en vigueur et du fait qu’elle ne pourra pas travailler pendant la période de confinement obligatoire, l’employeur lui offre deux options: raccourcir son séjour ou reporter ses vacances à un autre moment.
Malgré ces alternatives proposées par l’employeur, la plaignante décide tout de même d’effectuer son voyage de trois (3) semaines, suite auquel elle complète sa période de confinement de quatorze (14) jours. À son retour au travail, elle est suspendue pour cinq (5) jours en raison de son absence non autorisée.
Afin de contester cette mesure disciplinaire de l’employeur, la plaignante dépose une plainte en vertu de l’article 122 de la Loi sur les normes du travail (LNT) soutenant avoir fait l’objet de représailles pour avoir exercé le droit prévu à l’article 72 de la LNT, soit celui de connaître la date de son congé annuel au moins quatre semaines à l’avance.
La décision
Après analyse, le Tribunal conclut que l’employeur n’a pas porté atteinte au droit de la plaignante de connaître la date de ses vacances. Au contraire, lorsqu’elle a demandé ses vacances au mois d’avril 2020, celles-ci lui ont été accordées avec célérité. Le Tribunal ajoute que la plaignante confond son droit de connaître la date de ses vacances annuelles avec le droit de disposer de ses vacances selon son choix personnel, ce dernier n’étant pas un droit protégé par la LNT.
Aux yeux du Tribunal, le litige ne découle donc pas de la prise des vacances, mais du fait que la plaignante n’était pas disponible pour travailler à la fin de celles-ci. Toujours selon le Tribunal, les alternatives proposées par l’employeur ne contreviennent pas à la LNT et visaient plutôt à offrir des solutions permettant à la salariée d’offrir sa prestation de travail à la fin de sa période des vacances.
Le Tribunal conclut en ajoutant que l’employeur était en droit d’exiger que la salariée soit de retour au travail après la période de vacances approuvée et conséquemment d’imposer une sanction disciplinaire en raison de l’extension de vacances non approuvée par celui-ci. La plainte est ainsi rejetée[2].
À retenir
En période de pandémie, si un employé envisage de voyager pendant ses vacances, les mesures sanitaires imposées par le gouvernement fédéral ou provincial peuvent, bien entendu, avoir un effet sur la durée du séjour. En effet, la LNT n’autorise pas un salarié à prolonger ses vacances dans le but de se soumettre aux consignes sanitaires d’isolement ou autres. En outre, l’employeur n’a pas l’obligation de consentir à une telle prolongation.
L’auteure désire remercier Guillermo Uria Santander, stagiaire en droit, pour son aide dans la préparation de cet article
[1] Lino c. Patrice Rivet & Manon St-Jean Pharmaciens, 2022 QCTAT 2503.
[2] Dans cette même veine, mais dans un milieu syndiqué, voir : Teamsters Québec, local 1999 c. Purolator, 2022 CanLII1102 (QC SAT)