Le 17 février dernier, dans l’arrêt FIQ — SPSSODIM c. CIUSSS de l’Ouest-de-l’île-de-Montréal, la Cour d’appel rappelle que les larges pouvoirs octroyés aux arbitres de grief ont des limites, notamment en matière de création de postes dans un contexte de surcharge de travail.

Le contexte

En 2016, des infirmières et infirmières auxiliaires, membres du Syndicat des professionnelles en soins de santé de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal (le Syndicat), déposent une plainte de fardeau de tâches, en lien avec une surcharge de travail pendant leur quart de travail de nuit.

L’arbitre de grief accueille la plainte en concluant à l’existence d’un fardeau de tâches pendant les quarts de travail de nuit, mais également pendant les quarts de jour et de soir. Il ordonne entre autres le rétablissement de l’horaire de travail antérieur, la création de postes d’infirmières et d’infirmières auxiliaires ainsi que la création, la transformation et l’affichage de postes de préposés aux bénéficiaires (PAB), soit des salariés faisant partie d’une autre unité d’accréditation que celle du Syndicat.

Dans le cadre du pourvoi en contrôle judiciaire demandé par l’Employeur, la Cour supérieure accueille en partie la demande en concluant notamment que l’arbitre a outrepassé l’objet de la plainte en se prononçant sur tous les quarts de travail.

La décision

Concernant le fait que l’arbitre de grief s’est prononcé sur tous les quarts de travail et non uniquement celui visé par la plainte, la Cour d’appel conclut que la Cour supérieure a mal appliqué la norme de contrôle de la décision raisonnable, jugeant ainsi que l’analyse de l’arbitre est motivée et intelligible.

Quant à la création de postes de PAB non visés par l’unité d’accréditation du Syndicat, la Cour d’appel conclut que l’arbitre a élargi la portée de ses pouvoirs au-delà de ce que le législateur et les parties ont souhaité, ce qui est déraisonnable. Bien que l’arbitre dispose d’un large pouvoir de réparation, ce pouvoir doit être exercé dans les limites prévues par la loi et par la convention collective applicable. Le périmètre juridictionnel de l’arbitre est donc limité à sa propre compétence lorsqu’il détermine les réparations appropriées.

La Cour d’appel accueille donc l’appel en partie.

Ce qu’il faut retenir

Malgré les larges pouvoirs de réparation octroyés aux arbitres de griefs, ces pouvoirs se doivent d’être exercés dans les limites prévues par la loi et la convention collective. Ainsi, un arbitre de grief ne peut ordonner une mesure de réparation qui outrepasse les limites de sa compétence, notamment en imposant une obligation qui ne découle pas de la convention collective intervenue entre les parties ou des dispositions d’ordre public.

L’auteure tient à remercier Kassandra Rousseau, stagiaire en droit, pour sa généreuse contribution à la rédaction de ce billet.